Depuis plus de 40 ans, la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants relie les bâtisseurs communautaires, les organisateurs étudiants et les militants de terrain autour des questions qui importent le plus aux étudiantes et étudiants — de l’appel à la gratuité, à la qualité et à l’accessibilité des frais de scolarité à l’instauration d’une culture du consentement sur les campus, en passant par la lutte pour les droits des étudiantes et étudiants de partout dans le monde ainsi que des apprenantes et apprenants autochtones. En ce mois de la fierté, nous examinons la nouvelle politique canadienne de don de sang et les changements qu’elle prévoit pour les communautés queer et trans.
Chaque minute de chaque jour, une personne au Canada a besoin de sang pour sauver sa vie. Malheureusement, le don de sang a pris un énorme coup pendant la pandémie de la COVID-19, incitant les pays du monde entier à adopter de nouvelles lois pour des réserves de sang plus inclusives et diversifiées. En avril 2022, le Canada a suivi le mouvement en annonçant une révision de sa politique de sélection des donneurs de sang. Ce nouveau changement tente de soustraire l’orientation sexuelle de l’équation et se concentre plutôt sur les comportements sexuels à haut risque.
Une histoire de résistance
En raison des craintes croissantes suscitées par la pandémie du VIH/SIDA en 1992, la Société canadienne du sang (qui était alors la Croix-Rouge canadienne) a imposé une interdiction à vie des dons de sang provenant d’hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH), entraînant un impact disproportionné sur les communautés bispirituelles et trans. Cette interdiction s’est poursuivie jusqu’en 2013, date à laquelle elle s’est transformée en périodes d’exclusion, dont la durée a depuis changé.
Tout au long de cette période, les étudiantes et étudiants ont joué un rôle important dans la défense de la cause des personnes homosexuelles au Canada. Dans un gazouillis sur Twitter, Shannon Salisbury, ancienne étudiante activiste, se souvient de son passage à l’Université Carleton en 1996, où elle a mené une manifestation sur le campus contre l’interdiction du don de sang. Bien des années plus tard, les étudiantes et étudiants de Carleton continuent de débattre sur le sujet, et en 2012, une association étudiante a voté pour maintenir l’interdiction des collectes de sang sur le campus qui interdisent aux hommes gais de faire des dons.
En 2015, le gouvernement libéral nouvellement élu a exprimé sa volonté de finalement mettre fin à cette pratique. La même année, la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants a coordonné des consultations avec la Société canadienne du sang pour discuter des lacunes de la procédure de dépistage, affirmant qu’elle devrait être fondée sur des comportements dont il est scientifiquement prouvé qu’ils présentent un risque élevé de transmission d’agents pathogènes transmissibles par le sang, et non sur les stéréotypes des personnes queer et trans.
Sept ans, cinq millions de dollars et d’innombrables études plus tard, la nouvelle politique introduira à compter du 30 septembre 2022 « un nouveau questionnaire de sélection en fonction des comportements sexuels auquel tous les donneurs de sang et de plasma devront répondre. » Si le comportement d’une personne est signalé comme étant à haut risque, elle sera soumise à une période d’exclusion de trois mois au cours de laquelle elle devra s’abstenir de ce comportement avant d’être autorisée à donner du sang.
Qu’est-ce que cela signifie pour les communautés queer?
Dans une déclaration de la Gay Men’s Sexual Health Alliance, l’organisation attire l’attention sur le « préjugé inhérent » du questionnaire. Bien que la nouvelle politique n’interdise pas explicitement les rapports sexuels entre gais ou bisexuels, les actes sexuels typiquement liés aux gais, bisexuels, bispirituels et transgenres sont toujours considérés comme des comportements à haut risque.
Pour les groupes racialisés et sous-représentés, la nouvelle politique est une fois de plus décevante. La docteure OmiSoore Dryden, spécialiste du don de sang et titulaire de la chaire James R. Johnston en études sur les Noirs canadiens à la faculté de médecine de l’Université Dalhousie, reconnaît que cette annonce aurait dû être faite depuis longtemps.
Le mois de la fierté est synonyme de joie et de résistance
Nous devons célébrer les petites victoires en poursuivant l’organisation et en reconnaissant les mouvements qui nous ont menés jusqu’ici. Dans une déclaration de la coalition Tous Le Même Sang, la campagne a souligné le travail des « activistes, des organisations 2SLGBTQ+, des syndicats étudiants et des syndicats du travail [qui] préconisent depuis longtemps la fin de cette interdiction discriminatoire ».
Reprenant l’appel des activistes et des organisations 2SLGBTQ+ pour que la Société canadienne du sang intègre les pratiques sexuelles sans risque dans sa politique de dépistage, la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants demande également à la Société canadienne du sang de coordonner des consultations communautaires diversifiées avec les personnes qui ont été historiquement exclues du don de sang.
Grâce à ces changements, le système canadien d’approvisionnement en sang sera plus sûr, plus réactif aux infections potentielles et fera appel à un plus grand nombre de donneurs. Et comme plusieurs étudiantes et étudiants ont repris leurs cours en présentiel, ils auront à nouveau la possibilité de donner du sang dans les laboratoires de don de sang des campus. En fait, renforcer la ligne de vie du Canada ne devrait pas être si difficile.